Au bas de ma rue.
Il est apparu un jour ou un autre cette fin d'été, avec les nouveaux propriétaires - qui sont-ils, comment en sont-ils venus à trouver et employer cet homme-là, lui entre tous, ce Turc-là, cet être humain venu du bout du monde se perdre au bout d'un autre monde, pays gigantesque sur- et sous-peuplé comme son pays d'origine ?
Il baragouine un anglais taché de fort accent étranger, le parle mieux qu'il ne le comprend - il n'a pas besoin de comprendre beaucoup pour faire ce travail. Je lui demande le plein, il comprend deux gallons, s'en étonne, nous rions. Comme si ma voiture pouvait s'en contenter...
Je ne porte pas d'alliance, il m'entreprend dans cet anglais poussif qu'il a dû apprendre sur le tas très vite - adaptation brute de survie pour exercer un métier dans cette ville loin de toute communauté turque voire même orientale. Seul son langage est poussif, il sait ce qu'il veut et fait tout ce qui est en son pouvoir ténu et ses moyens minimes pour l'obtenir, le langage se pliera à sa volonté, il fera passer son message coûte que coûte.
Il ne comprend pas mon accent comme je peine à comprendre le sien. Il comprend ou suppose par défaut naïveté ou inexpugnable évidence que je suis une immigrée comme lui. Il me drague, veut m'épouser presque, pose des jalons pour une autre rencontre, moins formelle.
Pour une poignée de dollars, quelle est la misère, la nécessité qui a forgé son destin, bousculé son quotidien, forcé sa venue, impliqué son atterrissage ici entre tous les endroits de la terre ? Pourquoi ici ? Comment ici ? D'où vient-il ? A-t-il laisse famille, femme et enfants là-bas ? Pourquoi l'Amérique? Pourquoi ?
Je pourrais écrire un roman noir, peut-être.
Qu'adviendra-il de lui ?
Calling you, I am calling you.
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suis-je
Eté
suis-je
ou au pourrissement des blés
suis-je
Eté
suis-je revenue
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am I
summer
am I
or have I arrived
am I
summer
have I found again
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l'été me glisse entre les mains
à petits pas
temps inutilisé
l'été m'échappe sans ses grands pastis
ses longues discussions jusqu'au coeur de la nuit
petits repas entre amis
l'été m'échappe avant de décliner
tel un rêve
l'été s'échappe |
Summer slides through my hands
on small steps
time unexploited
summer escapes me without its tall pastis
long discussions into the heart of night
simple meals among friends
summer escapes me before its decline
such a dream
summer escapes | ||
Il y a des gens par essence
Les roulements amateurs -
Puis le tching aigu de la cymbale
Il y a des gens par essence
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Some people are born
Then his latest acquisition,
Amateur parade rolls,
The sharp tsching of the cymbal
Some people are born
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jerseyworks home
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